Atelier peinture enfants 2018 : ADE

Les élèves s’expriment

J’écris cet article après trois séjours au Sénégal,  en partant des peintures faites en 2018 et les consignes données à ce moment-là. C’était la première fois que je faisais faire de la peinture à un grand nombre d’enfants et que je pouvais ainsi découvrir des particularités. À l’époque j’étais loin de penser que ces photos seraient autre chose qu’un souvenir pour moi, donc je les ai essentiellement pris à des moments relativement calme pendant l’activité. À mon séjour en 2020 j’avais réussi à photographier après coup l’ensemble de la production de chaque classe, mais dans le futur je voudrais m’organiser autrement, prévoir du temps en plus, pour prendre les feuilles une par une en photo pour avoir de meilleurs exemples.

Entre créativité et stéréotype

Je l’avoue, ma curiosité était grande en venant la première fois au Sénégal pour faire faire de la peinture aux enfants. Que vont ils peindre dans un environnement si différent du notre? Avec une autre culture et religion?
Avant mon premier séjour, sachant partir dans un pays dont la majeur partie de la population est musulmane, j’avais demandé à Djibril Sané si je pourrais demander aux enfants de peindre des humains: « Nous sommes un pays libre » m’a-t-il répondu.

J’avais quelques idées en tête, venant de mon expérience européenne…qui se sont rapidement avérées irréalisables : les enfants, les plus jeunes, n’avaient pas les compétences linguistiques pour comprendre ce que j’aurais voulu qu’ils fassent, aux plus grands manquait l’expérience des années de cours en art plastique sur laquelle on peut compter chez nous.
Donc l’essentiel pour moi était de leur donner un espace de liberté, de plaisir, une expérience nouvelle : peindre à leur guise et décider d’eux-même quand leur peinture était terminé.
Avec très peu de consignes :

  • Utiliser le pinceau d’une façon adéquat
  • Ne pas mélanger (de trop les couleurs
  • Remplir la feuille

Les élèves ont l’habitude d’un enseignement essentiellement frontal, théorique et basé sur la répétition et l’apprentissage par cœur, on recopie ce qui est au tableau. Donc dire qu’ils ont le droit de peindre ce qu’ils veulent est une drôle d’expérience pour les enfants, on regarde d’abord ce que fait le voisin…c’est le/la plus téméraire qui se lance en premier.
Voici quelques particularités de l’iconographie des enfants des deux écoles, que je n’ai pas vu dans les classes où j’enseignais en Europe.

Comme il n’y a pas de sujet, les enfants peignent ce qui est important pour eux à ce moment précis de leur vie.

 

Les intérêts

 

Pour les plus jeunes : l’écriture et les formes géométriques

 

 

Rien d’étonnant quand on commence à lire et calculer de remplir la feuille avec des signes. Et une grand partie des enfants a écrit le nom de l’école, de l’enseignant, de la classe, une vrai fierté d’y être.

Pour les ados « love » des cœurs et des fleurs autant pour les filles et les garçons

Des particularités

 

Le drapeau du Sénégal

 

Certains partis politiques en rêveraient ici de voir des enfants peindre spontanément le drapeau national. J’ai eu un garçon qui remplissait sa feuille avec le drapeau, sinon rien d’autre, tellement c’était important pour lui.
Le mystère c’est un peu levé en 2020, quand nous avons assisté à la pointe Saint George au début des cours le lundi matin:

 

 

 

Des petits points comme décoration ou remplissage des vides

 

Je n’ai pas pu avoir d’explication pour cette façon de faire qui me rappelle un peu certains tableaux roumains, puis des peintures aborigènes. Pour des suggestions, utilisez les « commentaires » tout en bas, s’il vous plaît.

La maison – un stéréotype particulier

 

En 2017, à mon premier séjour, j’ai été très curieuse de voir comment des enfants vivant dans une banlieue dont toutes les maisons sont équipées soit d’un toit plat en tôle, soit d’une terrasse au dernier étage (qui sert essentiellement à sécher son linge) allaient dessiner ou peindre une maison.
À un moment donné, pendant que j’intervenais dans la classe préscolaire, l’enseignante à dessiné une maison au tableau, donc je savais, c’était « foutu », les enfants allaient reproduire le stéréotype vu au tableau. Et j’ai pu voir qu’il y avait très peu de variantes, même chez les adolescent.e.s. Et cette maison est quand-même particulier avec un toit en triangle, et surtout la position des fenêtres qui se trouvent en haut dans les deux coins extérieurs, sous le toit, bien plus haut que la porte.

Un autre stéréotype – la voiture

 

Un stéréotype utilisé par les ados, donc probablement en relation avec l’enseignement. Les plus jeunes dessinent les voitures en commençant par le contour.

 

Observation, créativité et expressionnisme

 

Ce que voulais faire passer comme message est que la peinture n’est pas forcément « dessiner avec un pinceau » mais quelque chose de plus libre, d’abstrait, la couleur pour soi, le geste. Une petite partie des enfants s’y est mis, j’ai du freiner quelques uns pour éviter que le papier ne se déchire. (Pour une question de finances, les enfant avaient à leur disposition seulement du papier de 80gr, acheté en ramette au marché).
Et quelques rares enfants ont peint de mémoire des objets qu’ils avaient bien observé auparavant, peut-être des enfants qui avaient des occasions de dessiner chez eux?

 

La consigne – remplir la page
De rares animaux
Un cas particulier…

 

Un garçon de six ans peint…d’abord un magnifique vélo…puis il est « pris » par la matière et le geste. Aurait-il fallu « sauver » le vélo?  Oui, mais juste avec une photo – l’artiste a toute sa liberté.

 

Un quart d’heure plus tard…

 

 

Un groupe respectant particulièrement bien la consigne

 

 

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