L’île de Gorée – mémorial de l’esclavage

L’île de Gorée – île mémoire

 

Petite île bien protégée des vents forts dans la baie de Dakar, elle a une histoire mouvementée. Les Portugais y ont mis pied en 1444, elle est tombée entre les mains des Hollandais, puis des Français, un intermède anglais avant de devenir nouveau française.

Son port, protégé par un fort, accueillait des bateaux venant d’Europe chargés de marchandises, d’explorateurs qui partaient vers l’intérieur de l’Afrique…et qui repartaient chargés de gomme et d’esclaves.

Après la ville de Saint Louis, l’île de Gorée fut, d’un point de vue de l’importance, le deuxième port qui servait à la traite triangulaire pendant trois cents ans sur le territoire de l’actuel Sénégal.
Les esclaves échangés aux rois Wolof et Toucouleur contre des textiles, armes à feu et blanches, métaux, alcool et faïences furent vendus aux Antilles, en Louisiane et autres colonies d’outremer, contre des produits coloniaux (coton, sucre, tabac…) qui alimentaient le marché Européen.
Ce trafic assurait un essor économique à des régions entières d’Europe, fournissait de la main d’œuvre corvéable et gratuite aux colonies d’Amérique et vidaient l’Afrique d’une population jeune, bloquant ainsi son développement économique.
Le fait qu’il y a eu enrichissement de certains royaumes reste un tabou, tout comme la traite arabo-musulmane (voir plus loin).

(Pour plus de détails, demandez s.v.pl., suivant vos centres d’intérêt, à un moteur de recherche et à Wikipédia.)

Même si, par rapport au Golf de Guinée ou à Saint Louis, il y a eu bien moins de départs de négriers à partir de Gorée, c’est cette petite île qui est devenue lieu de mémoire de l’esclavagisme.

 

L’île de Gorée – entre mythe et réalité

 

L’île de Gorée est rapidement devenue un lieu de brassage de marchandises et de populations, un centre culturel et un lieu d’évènements festives. De riches armateurs et notables se mariaient « à la mode du pays », bâtirent de confortables maisons à leurs épouses africaines et leur descendants, l’île était sous le charme des Signares.

Après la fondation de Dakar en 1857, Gorée perd progressivement son importance, les notables et signares déménagent, leurs demeures sur l’île se dégradent.
Gorée renaît à partir de 1978, date à laquelle l’île fut déclarée « Patrimoine nationale de l’Unesco », petit à petit ses bâtiments retrouvent leur cachet d’antan.

La « maison des esclaves », dont la visite est quasiment obligatoire pour tout touriste, fut rénovée en 1990 par des fonds de l’Unesco et divers autres donateurs.  Depuis, le conservateur du lieu nous fait le récit de l’esclavagisme…la case des hommes, des femmes, des enfants…

Néanmoins, la demeure  ne daterait que de 1783, donc peu avant l’abolition de l’esclavagisme. Elle appartenait à la belle Signare Anna Cola Pépin, la véritable « esclaverie » se situait bien plus près du port.
Cette visite a donc plus une valeur symbolique que historique.

Ce petit documentaire de 1994 fort intéressant, explique bien la vie des Signares et montre Gorée avant l’invasion des touristes, un petit bijou:  Gorée, île des Signares

Peint par Hastrel de Rivedoux en 1839 (BNF)

L’île de Gorée – à l’heure du tourisme

 

photo: agence de tourisme Sénégal

Cette petite île attire évidemment beaucoup de monde, c’est le passage quasi obligatoire des touristes de tous les pays du monde.

On traverse rapidement la rade de Dakar, une navette part environ toutes les demi-heures. On goûte le calme d’un lieu sans voitures, les ruelles y sont propres. Des restaurants s’alignent le long de la côte, il y a même une petite plage de sable sur le côté abrité du vent.

Et évidemment ne manquent pas les endroits pour acheter de l’artisanat et de l’art. En bas, m’a-t-on dit, sont installés les vendeurs de Dakar, qu’on rencontre sur la navette si on fait la traversée tôt. Sur les hauteurs, vers le fort, les artistes locaux. On est bien loin du temps des Signares…

Petite promenade…

La demeure d’Anna Cola Pépin – maison symbolique du souvenir…
Au rez-de-chaussée:  « cellules des esclaves » – plus probablement dépendances  et entrepôts (voir peinture).
À l’étage:  logement, actuellement exposition.

Pour ceux qui veulent en savoir plus, quelques liens en dehors de Wikipédia (une des sources de l’auteur) :

 

Sujets tabous : La traite arabo-musulmane et la co-responsabilité  des africains dans la traite

 

Quelques universitaires sénégalais mettent de plus en plus souvent ces sujets en avant, mais le chemin à faire est encore long. Quelques exemples:

Quand, en 2008, l’anthropologue sénégalais Tidiane N’Diaye publie son enquête historique « Le génocide voilé », celle-ci est très mal reçue au Sénégal, son projet d’un mémorial de la traite arabo-musulmane n’a pas pu aboutir.

Très parlant est un souvenir que relate Ibrahima Thioub, professeur d’histoire à l’université Cheikh Anta Diop à Dakar (et pendant quelques années son recteur) dans la vidéo ci-dessous, ce souvenir date d’une conférence à Bamako en 2002.
Après cette conférence, en privé, des réactions
– d’un noir: …Il faut explorer ces choses, mais pas le dire devant les blancs…
– d’un blanc: …félicitations, je pense exactement la même chose que vous…je n’ose pas le dire parce qu’on va m’accuser d’être raciste…

Des vidéos à ce sujet (mes sources):

 

 

 

 

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